« MARGINALIA »* (EN MARGE, DANS LA MARGE)

de ANS VAN BERKUM, ROGER CARDINAL, JOS TEN BERGE, COLIN RHODES

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Certains lieux naissent sous une bonne étoile, et se développent harmonieusement. D’autres semblent d’emblée maudits, et ni les plus grands talents, ni les meilleures volontés ne parviendront à faire valoir les lettres de noblesse dont ils peuvent s’enorgueillir ! Tel fut le cas du Musée de Stadshof, en Hollande.

Créée autour de donations d’artistes comme Rosemarie Köczy ou Gérard Sendrey…, cette collection refusée par Rotterdam, fut implantée à Zwolle, ville de moyenne importance. Ce lieu (un ancien palais de justice aménagé) devenait l’unique musée de cette forme de pensée artistique aux Pays-Bas. 

        Perçu intelligemment par la critique, il aurait pu devenir une sorte de creuset artistique et une incontournable référence dans l’histoire de l’art marginal. Car il avait la chance d’avoir été confié à Madame Ans Van Berkum, dont l’intérêt toujours en éveil permit d’accroître considérablement la collection originelle ; d’organiser de riches expositions illustrant toutes les tendances hors-les-normes traditionnelles ; les prolonger par celles, contemporaines, qui se réclament de cette mouvance. Soucieuse de pédagogie, Ans Van Berkum avait tenté de faire percevoir au public l’intérêt des expositions temporaires ; et conçu de façon très originale et non conventionnelle, la présentation des œuvres de la collection permanente, afin que soient évidents les informations relatives à chaque œuvre et le contenu du travail : en conséquence, pas de cimaise « Untel », pas de coin «Unetelle»…            Des œuvres installées par rapprochements de tendances, de thèmes, etc. ; ou au contraire par antithèse. Et, de la part du conservateur, la volonté, les efforts jamais abandonnés pour faire comprendre ses orientations, ses buts…**²

          Et le public suivit, toujours plus nombreux et enthousiaste. Tout aurait donc dû aller pour le mieux. Hélas ! C’était compter sans l’obscurantisme, la présomption et le snobisme ! Aucun critique ne se posa la moindre question : habitués à discourir à l’infini sur un « art contemporain » froid et raisonné mais « dans le vent », ils traitèrent l’Art singulier à l’aune de leurs critères. La pédagogie et l’originalité devinrent « anarchie » ; l’obsession créatrice des gens exposés devint « manque d’imagination » ; la spontanéité fut « absence de savoir-faire ». Bref, rien dans cette collection ne fut jugé digne de respect et de considération. Pendant six ans, Ans Van Berkum porta donc à bout de bras son musée, le défendant bec et ongles contre des attaques de plus en plus pressantes. D’autant que les instances locales, frustrées de n’avoir pu ouvrir un musée d’Art contemporain, s’acharnèrent à prolonger le travail de sape de la presse.

         Lutte du pot de terre contre le pot de fer ! Lequel pot de fer s’empara d’une triviale affaire de billetterie mal gérée pour « démissionner » le conservateur**, et fermer le musée. La situation en est là : le musée fermé, la collection dans des caisses. Quelques personnes demeurées fidèles  cherchent pour cette dernière un nouveau lieu d’accueil. Tous les artistes qui avaient offert des œuvres (pour certains, il s’agissait de dons importants) sont dans l’expectative ; et le public se sent frustré par l’incompréhension et la bêtise de quelques plumitifs et de leurs parallèles administratifs !

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         **La plupart des lecteurs du Bulletin auront reçu des lettres de la direction du musée accusant de tous les maux Ans Van Berkum. Mais –comme par hasard-, ils n’auront reçu aucun courrier leur précisant que les tribunaux l’avaient totalement blanchie, avec droit absolu de réintégration si jamais le musée rouvrait ses portes !

 

 

          C’est pourquoi la parution de MARGINALIA, PERSPECTIVES SUR L’ART SINGULIER apparaît (et le fait que cette publication prévue dans le cadre du musée ait dû se faire AVEC celui-ci comme éditeur, confirme bien que les reproches formulés à l’encontre de Ans Van Berkum n’étaient qu’un mauvais prétexte) comme une belle revanche et un juste hommage à son courage et sa détermination. Cette publication aurait dû intervenir avec la grande exposition (la dernière de cette envergure, hélas !) intitulée « Les Maîtres de la Marge ». Elle fut reportée et  n’a pu voir le jour qu’à la fin de l’année 2000. En hollandais et en anglais.

L’introduction résume longuement la difficulté rencontrée par le musée et ses quelques défenseurs, face à l’obstruction systématique pratiquée par la presse et l’administration.

 

Quatre intervenants y participent pour « mettre en lumière l’histoire, la définition, la réception et l’influence de cet art « de la marge » ; et aussi examiner sa relation avec ce qui est généralement considéré comme le courant officiel ». 

Chacun d’eux a œuvré sur un aspect différent de l’art marginal.

 

          ANS VAN BERKUM : Historienne d’art. Elle a enseigné à l’Université d’Utrecht de 1988 à 1991, et dirigé le Musée de Stadshof de 1993 à 2000. Elle a publié de nombreux récits sur l’art depuis 1980. Son ouvrage majeur, paru en 1998 s’intitule Willem Van Genk, un homme traumatisé et son monde.***

        Elle « décrit »  l’histoire de l’Art singulier depuis sa découverte jusqu’au moment où il est devenu muséal. Et examine la manière dont les musées qui lui sont consacrés le présentent au public.

 

        ROGER CARDINAL : est l’auteur de  L’ART OUTSIDER  (1972) ; Les peintres primitifs (1978) ; et de nombreux articles et préfaces de catalogues sur les arts marginaux. Il collabore à Raw Vision. Il organise de nombreuses conférences. Il a participé à l’élaboration de l’exposition « Messages d’Outre-tombe » à la Halle Saint-Pierre à Paris.

          Depuis la parution de « Outsider Art » qui fut l’ouvrage de référence de cette mouvance marginale, il continue de s’intéresser à l’évolution de celui-ci ; et examine la signification de l’ « Art en marge » en général et dans ses implications par rapport au « centre » présumé.

 

          JOS TEN BERGE : Historien d’art. Il enseigne à l’Université d’Amsterdam. Il a soutenu une thèse sur « Les drogues dans l’art. De l’opium au LSD, de 1798 à 1968 ». Il a participé à l’élaboration de l’exposition du Musée de Stadshof, « Les Maîtres de la marge » et édité le catalogue qui accompagnait l’exposition.

          Il analyse les différentes façons dont, dans le passé, l’Art singulier a été considéré ; et plaide, comme le fait Roger Cardinal, pour qu’une attention plus grande soit dévolue au travail lui-même.

 

          COLIN RHODES : a tenu de nombreuses conférences sur l’Art contemporain. Il est l’auteur de Primitivisme et art moderne ( 1994) et  L’Art Singulier : alternatives spontanées  (2000) qui renferme de nombreuses illustrations prises parmi les œuvres du musée de Stadshof. Il a contribué activement à la « Session de l’Université ouverte hollandaise sur l’Expressionnisme ». Il est professeur à l’Université de Loughborough.

          Il étudie l’influence qu’a pu avoir l’Art singulier sur les mouvances contemporaines et analyse la position que l’on peut accorder à cet art dans la période post-moderniste.

 

          Il s’agit donc d’un ouvrage important que les personnes pouvant lire l’anglais ne manqueront pas de se procurer. 

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* « Marginalia » : « Dans les monastères médiévaux, les scribes cherchaient parfois un peu de répit à la monotonie de copier les Saintes Ecritures, en ajoutant de petits dessins dans les marges. Ces dessins allaient de descriptions profanes du quotidien, à des monstruosités obscènes démentant la soi-disant piété des moines. Michel Camille évoque cette riche source de créativité dans son ouvrage L’image sur le Bord (dans la marge)… » (Roger Cardinal )

Jeanine RIVAIS

 

***MARGINALIA : Ce texte traduit en français par Jeanine RIVAIS pour le Bulletin… a été publié DANS LE N° 64 DE JUIN 1999 DU BULLETIN DE L'ASSOCIATION LES AMIS DE FRANCOIS OZENDA.

Cet ouvrage (MARGINALIA EDITEUR MUSEE DE STASHOF D'ART NAÏF ET OUTSIDER2000) est visible au CENTRE POMPIDOU :Bibliothèque Kandinsky centre de documentation et de recherche du Musée national d'Art moderne)

VOIR AUSSI : ENTRETIENS AVEC ANS VAN BERKUM ET NICO VAN DER ENDT DANS LE N° 59 DE JANVIER 1994 DU BULLETIN…

CRITIQUE DE JEANINE RIVAIS DANS LE N° 44 DE NOVEMBRE 2001 DE LA REVUE DE LA CRITIQUE PARISIENNE.

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MARGINALIA, PERSPECTIVES SUR L'ART SINGULIER

Par ANS VAN BERKUM, ROGER CARDINAL , JOS TEN BERGE, COLIN RHODES

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          Le Musée d'Art Naïf et Outsider, en Hollande, haut lieu pendant cinq ans, de l'Art singulier en Europe, est l'exemple-type de ce que peut faire l'officialité quand elle désire imposer ses normes, ses critères, son obscurantisme refusant tout ce qui ne marche pas dans ses pas !  Très fréquenté par un public de plus en plus intéressé, il a néanmoins été fermé parce que la municipalité de Zwolle où il était implanté, n'en a plus assumé la responsabilité. 

          C'est pourquoi la parution de "Marginalia, perspectives sur l'Art singulier" (et le fait que cette publication prévue dans le cadre du musée, ait dû se faire avec celui-ci comme éditeur, à la suite d'un long procès conclu au bénéfice de Mme Ans Van Berkum, (la conservatrice)),apparaît comme une belle revanche et un juste hommage à son courage et sa détermination. Cette publication aurait dû intervenir avec la grande exposition (la dernière de cette envergure, hélas !) intitulée "Les Maîtres de la Marge". Elle fut reportée, et n'a pu voir le jour qu'à la fin de l'année 2000. En hollandais et en anglais.

L'introduction résume longuement la difficulté rencontrée par le musée et ses quelques défenseurs, face à l'obstruction systématique pratiquée par la presse et l'administration. 

Quatre intervenants contribuent ensuite à "mettre en lumière l'histoire, a définition, la réception et l'influence de cet art "de la marge" : et aussi examiner sa relation avec ce qui est généralement considéré comme le courant officiel".

Chacun d'eux a œuvré sur un aspect différent de l'Art marginal.

Il s'agit donc d'un ouvrage important que les personnes pouvant lire l'anglais ne manqueront pas de se procurer.

 

"Marginalia": « Dans les monastères médiévaux, les scribes cherchaient parfois un peu de répit à la monotonie de copier les Saintes Ecritures, en ajoutant de petits dessins dans les marges. Ces dessins allaient de descriptions profanes du quotidien, à des monstruosités obscènes démentant la soi-disant piété des moines. Michel Camille évoque cette riche source de créativité das son ouvrage L’image sur le Bord (dans la marge)… » (Roger Cardinal )

Jeanine RIVAIS

 

CE TEXTE A ETE PUBLIE DANS LE N°44 DE NOVEMBRE 2001 DE A REVUE DE LA CRITIQUE PARISIENNE.