MARCEL KATUCHEVSKI A LA RECHERCHE DE SON HISTOIRE.
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Ne pas avoir vécu la guerre. Etre né juste après, dans une famille décimée, incapable d’oublier les terreurs de l’Holocauste. Etre “un enfant du miracle” et du deuil, au point d’en devenir comme par héritage génétique, si imprégné, que son seul recours soit de peindre “son” histoire... Tel a été le “destin” de Marcel Katuchevski.
Cependant, son oeuvre infiniment sombre n’a jamais essayé d’être réaliste : l’homme devenu artiste par mal-être, a un jour commencé à dessiner ses obsessions, sans se soucier de canons picturaux, avec la liberté, le volontarisme des créateurs autodidactes. En une création où il est impossible de démêler la part de souffrance personnelle et de projection intellectuelle.
A un moment donné, pourtant, les peintures se sont voulues moins « noires », ont même fait une tentative d’humour, comme cette série où les personnages portaient d’étranges oreilles de lapins. Peine perdue ! Les visages tragiques placés sous ces « bonnets » disaient assez qu’ils vivaient une ironie désespérée.
Un peu plus tard, les dessins (gris, à la mine de plomb), enchevêtrements échevelés de fines lignes, ont paradoxalement paru s’apaiser. Sont devenus scènes familiales. Se sont rapprochés des icônes. Les visages ont conquis une sorte de noblesse tranquille. Ont pu laisser penser que, peut-être, Marcel Katuchevski avait trouvé quelques réponses, était enfin parvenu à se frayer un chemin vers un peu de paix ?
Vision trop optimiste, et uniquement momentanée. Car, dans les entrelacs et labyrinthes linéarisés de ses dernières oeuvres, les personnages à demi effacés, les visages aux yeux vides ou hallucinés, les reflets quasi-disparus dans des miroirs sans tain, toutes ces têtes sans corps en lévitation autour d’un personnage ayant gardé un semblant d’existence, laissent penser que l’artiste, de nouveau, a plongé dans la quête qui, depuis toujours, l’angoisse.
Jeanine Rivais.
CE TEXTE A ETE PUBLIE DANS LE N° 59 DU 2E TRIMESTRE 2008 DE LA REVUE DE LA CRITIQUE PARISIENNE.