EROTISME ET TENDRESSE CHEZ LES "PETITS COUPLES" DE
MICHEL SMOLEC.
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Lorsque Michel Smolec, poussé par les manifestations inconscientes de sa création, a quitté ses grands personnages seuls, il a "attendu" pendant plusieurs mois où, délaissant la terre, il a réalisé une série de dessins non moins déroutants que les sculptures. Seulement, voilà, au bout de ce temps, une nouvelle génération avait pris corps : Désormais, ses personnages allaient vivre en couples, illustrant des titres qui impliquaient à la fois complicité, tendresse et… érotisme : Bonheur du petit matin, Promesses, Au bois de Boulogne, 2 heures du mat' j'ai des frissons, Viens donc chez moi....
La tendresse ! Elle se manifesta immédiatement entre le sculpteur et ses œuvres, par la façon dont chacune est longuement peaufinée, chaque détail réfléchi. Elle l'amena vers des êtres qui, sans perdre le côté ludique de leurs aînés (le tragique étant momentanément oublié), étaient traversés d’histoires, de fantasmes, de mystère aussi, comme c’est le cas de l’érotisme lui-même. Mais comme toujours, jouant sur l'imagination, il préféra suggérer plutôt que montrer, provoquer l’œil et non pas le choquer, trouvant plus de sensualité dans la suggestion que dans le déploiement brutal.
Paradoxalement, se posa d’emblée pour lui, le problème de la position des jambes. Car c'étaient elles qui allaient déterminer l’apparence du corps, décider s’il serait légèrement penché, un peu tourné, etc. Elles qui "amèneraient" la petite culotte noire… "Noire" parce que cette couleur véhicule tous les tabous sensuels du "vrai" monde ! Et lorsque la femme allait se pencher, ce petit derrière offert au regard serait coquin à souhait, et mignon à croquer !
Et depuis lors, monte le galbe des fesses que l'artiste veut toujours bien modelées ; le ventre sur lequel la main passe et repasse, pour que l’arrondi semble appeler la caresse ! Viennent les seins, généralement menus lorsqu’ils sont nus ; mais plus volumineux, délicatement mamelonnés, lorsqu'ils sont vêtus, non pas étalés impudiquement, mais suggérés, à demi-cachés par le justaucorps au décolleté à balconnets, séparés par un bijou très simple qui en accentue les courbes. Les couleurs des terres que conjugue l'artiste confortent ces impressions, s’organisant peu à peu pour donner à ses petites créatures féminines, une vie, un mouvement ravissant.
Et les hommes ? Longtemps, ils ont été "hommes" par le port de leur tête, aux cheveux très travaillés et hirsutes. Mais un jour, l’un d’eux est apparu avec un zizi ! Et il avait l’air d’un petit Eros se pavanant devant les dames ! Mais là encore, Michel Smolec préfère suggérer. Certes, parfois, l’un d’eux tombe la chemise et, pris de frissons, semble prêt à tous les excès de la chair… Mais la plupart du temps, richement vêtus de costumes et bottines à boutons, ou de deux-pièces aux couleurs voyantes, crânes chauves ou coiffés de chapeaux chics ou casquettes gouailleuses, ils sont les partenaires compassés ou ardents, des dames dévêtues ou si peu habillées…
Placé côte à côte, face à face… chaque couple semble uniquement préoccupé de lui-même ! Pourtant, lors d'une exposition, le visiteur pouvait lire : "Nous sommes prêts à partir seuls, en couples, et même à changer de partenaires" !... Imaginez ce qui peut se passer !
Jeanine Rivais.