ENFANCE, ADOLESCENCE, ET AGE ADULTE DANS LES QUESTIONNEMENTS DE FRANCE GUIMEZANES, peintre
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Peindre un enfant, c’est, pour un artiste, en se laissant simplement porter par ses propres impulsions, trouver un moment, un espace où il est libre d’exprimer avec de la peinture des sensations, des lumières, des images, des souvenirs, des rythmes, des envies, des regrets, un amour la plupart du temps infini ; que chaque visiteur pourra ensuite ressentir.
Peindre un adolescent, c'est tenter de saisir un moment de mutation, l'instant d'un regard qui scrute, qui focalise ou qui fuit, un passage où le visage s'affermit sans être encore définitif : essayer, en somme, de percer un mystère !
Peindre un adulte, c'est trouver les traits que l'on a cherchés chez l'enfant, puis chez l'adolescent, "reconnaître" un être "fini", et déployer son talent pour témoigner de cette reconnaissance.
En fait, France Guimezanes passe tour à tour de l'un à l'autre. Mais, paradoxalement, pas pour chercher une quelconque ressemblance, plutôt pour explorer la fidélité du commencement à la fin d'un être, l'évolution d'un passage à l'autre. Le lien intérieur, en somme !
Autre paradoxe : diurne ou nocturne, le ciel est toujours bleu chez cette artiste ! Et toujours, comme il vient d'être dit, il luit pour un humain : enfant, adolescent ou adulte. Et dans son monde, les préoccupations évoquées correspondent souvent à la "vraie vie" : là, un enfant est blotti contre le sein de sa maman, mais elle-même est enlacée par son mari qui, subséquemment, semble les protéger tous les deux, dans une harmonie, une ambiance douce d'entente, de calme et de rêverie ; ailleurs, l'adolescent court, bras tendus vers l'avenir, tentant de voler "avec" ou "comme" les oiseaux qui l'accompagnent ; ailleurs encore, le couple est seul, les yeux clos sur la paix intérieure de chacun étroitement liée à leur dualité. Les visages sont figés dans la pose, en suspens…
Et le visiteur est étonné par l’homogénéité, la qualité et la sérénité qui se dégagent de ces œuvres, la plupart réalistes mais totalement intemporelles. Car nulle indication de temps, de lieu, de situation sociale ne permet de situer ces individus. Même si leurs attitudes peuvent sembler universelles !
Parfois, pourtant, France Guimezanes quitte la réalité, pour se lancer dans le rêve, une sorte de fantasmagorie a priori gentille, mais plongeant finalement loin dans son inconscient : Prend-elle alors son essor, à l'instar de ses personnages, tantôt à tire-d'aile, s'envolant vers la lune ; tantôt en costume de fée, endormie parmi oiseaux et papillons ; tantôt encore célébrant l'espérance du retour à la vie tellement important dans son esprit qu'elle peint "la femme arbre", celle-ci étant le tronc, à la fois humaine et végétale ; si proche qu'il est difficile de déterminer le point d'attache entre les deux. Mais il faut alors remarquer que seule la femme possède cette proximité avec l'arbre, comme pour en prendre la longévité, ou peut-être parce que comme lui, elle est capable de se courber dans la tempête et de résister sans se rompre, percevoir l'énergie qui monte et descend entre les racines et la cime ? Mis il faut aussi noter, autre paradoxe, qu'elle tient embrassé non pas un enfant, mais qu'elle donne une omniprésence à la chouette tel un esprit de la forêt qui symbolise la mort et le renouveau, la sagesse, la magie de la lune et les initiations, l'aidant sans doute de ce fait à exprimer tous ses questionnements face à sa toile et à sa vie ?
Ainsi, il semble bien que, finalement, dans l'esprit de France Guimezanes, le ciel ne soit pas aussi bleu ni aussi étoilé que sur sa toile ? Qu'elle n'en finit jamais avec ce qui est enfoui en elle : Bribes de souvenirs ? Réminiscences de bonheur ? Étreintes d’angoisse ? Aspiration à La liberté : toutes interrogations qui la poussent à peindre ? qu'elle essaie de dégager ce qu’il y a de circonstanciel dans sa vie. Aller à l’essentiel de ses émotions, partager avec les autres ce qui lui est important.
Pour ce faire, elle met dans ses personnages et ses ciels bleus toute sa sensibilité, sa fantaisie, sa tendresse surtout. Cherchant à travers ses créations le sens de la vie. Produisant ainsi une œuvre originale et poétique.
Jeanine RIVAIS
TEXTE ECRIT SUITE AU XXXe FESTIVAL "BANN'ART, ART SINGULIER ART D'AUJOURD'HUI" DE BANNE 2017.