Jeanine Rivais : Maryse Lebastard, nous nous sommes vues il y a deux ans. Nous avions fait une longue interview sur vos créations. Puis vous m'avez envoyé un mail pour me dire que vous aimeriez que nous parlions de nouveau parce que vous avez changé certains aspects de votre travail… A vous donc, la parole !
Maryse Lebastard : Il y a deux ans, je venais de commencer mes sculptures, et je n'en avais jamais parlé auparavant. Du coup, je trouve que nous n'avions pas trop insisté sur le côté humour qui emmène beaucoup ma barque. Et puis, la féérie. Et à un moment, vous aviez dit que vous trouviez que certaines de mes œuvres étaient tristes, et moi non. C'est ce côté-là qui m'avait un peu chagrinée.
J.R. : Effectivement, je trouve plus d'humour dans ce que vous présentez là que dans ce que vous présentiez il y a deux ans. Et je trouve que l'ensemble relève plus du conte et de la poésie que de l'humour non pas enfantin, mais du jeu. Que votre travail est ludique.
M.L. : Oui, c'est cela !
Au départ, je n'avais pas de four, et je faisais cuire mes sculptures chez une dame et nous faisions des cuissons raku. Je gardais la couleur du raku sur l'animal, et il y avait de l'émaillage sur le petit personnage. Peut-être cela donnait-il un air plus "triste" que maintenant où je mets des patines colorées.
J.R. : L'idée de cette nouvelle série est que vous avez toujours le porteur et le porté ? Et la plupart des portés sont sur le dos du porteur ?
M.L. : Sur le dos ou sur le devant ou sous le ventre. C'est très variable !
Les titres sont importants, aussi, parce que le chat dit au petit enfant : "Mais tu dors vraiment ?"
J.R. : Le porteur est toujours un animal, un écureuil, un rat, un hibou… Mais la plupart sont des chats. Et le porté est toujours humain ?
M.L. : Oui. En fait, j'ai voulu inverser les données pour montrer que si nous étions aussi petits que cela, peut-être certains humains feraient-ils moins de mal aux animaux ? Parce que je suis touchée par toute la maltraitance faite aux animaux. Et puis, il y a ce problème de tolérance que je ne mets peut-être pas en évidence, mais quand je discute avec les gens j'insiste sur le fait que, même très différents, on peut s'entendre à merveille ! J'ai donc pris l'animal comme vecteur…
J.R. : En fait, ce serait donc une série moralisatrice ?
M.L. : Oui, mais je ne l'annonce pas en montrant mes œuvres. C'est quand les gens me posent des questions que je l'exprime. Mais certains visiteurs le ressentent très fort.
J.R. : C'est la récurrence de cette situation, de ce rapport humain/animal qui atteste d'un souci.
M.L. : Un souci ?
J.R. : Un souci un peu militant de montrer la relation entre la bête et l'homme.
M.L. : Ils sont toujours très complices. L'animal est toujours très protecteur pour le petit être. Je les trouve vraiment en osmose!
J.R. : Oui. Mais quand je dis "le souci", j'entends la préoccupation de montrer !
M.L. : Oui, c'est tout à fait cela ! Et puis la tolérance par rapport au racisme, etc.
ENTRETIEN REALISE A BANNE, AU FESTIVAL BANN'ART ART SINGULIER ART D'AUJOURD'HUI le 6 mai 2016.
VOIR AUSSI : ENTRETIEN AVEC JEANINE RIVAIS :http://jeaninerivais.jimdo.com/ Rubrique FESTIVALS BANNE 2014.