LE PETIT MONDE FEMININ DE JOCELYNE DENOUAL
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Il semble bien que le monde de Jocelyne Denoual soit exclusivement féminin. Qui plus est exclusivement jeune. Et très "gymnique" ! Et très expressif !
En effet, toutes ses jeunes femmes réalisées à partir de papiers encollés, sont conçues en un style très gestuel, très lancé, comme si elle avait besoin de ce geste, comme si les montrer occupées à passer des heures à faire de petites choses, lui paraissait inconcevable !
Et les voilà, jambes et bras interminables ; longs cous fins ; corps effilés, souples ; toutes outrageusement maquillées, de la bouche rouge sculptée aux grands yeux cernés de rimmel et aux sourcils surlignés de noir ; cheveux frisés ou frisottés, longs, à couettes, à chignons… fronts dégagés ou couverts de petites mèches friponnes !
Et puis coquettes, portant robes largement décolletées, à fleurs, à volants, larges se soulevant au moindre vent, parfois tellement serrées en bas qu'elles prennent des allures de sirènes ; seins nus à tétins rouge vif, peut-être par provocation … collants ou bas à résille ; à la main leur petit réticule… Un paradoxe étant les énormes grolles qui les chaussent, l'autre l'absence de bijoux !
Gymnastes, donc ! Dansant ; assises jambes écartées buste en avant pour des exercices d'assouplissement ; roulant à bicyclette, sorte de bi plutôt, l'une lâchant les pédales, l'autre lâchant le guidon ; prenant leur élan pour sauter ; s'élançant dans leur maillot mini/mini pour plonger, etc.
Mais toujours hors du temps et hors des modes, gaies et colorées.
Parfois, Jocelyne Denoual abandonne les personnages de pied en cap pour se concentrer sur les têtes. Placées au bout d'une tige métallique ou carrément posées sur l'étagère ! rouges, vertes… décorées de fleurs, perdues au milieu de leurs congénères virevoltant autour d'elles !
D'autres fois, elle opte pour le format "carte d'identité" : robes à manches ; décolletés plongeant entre les seins ; pommettes largement accusées, rosies de maquillage ; lèvres d'un rouge presque noir… Droites sérieuses, têtes penchées moue dubitative, ou gentiment sarcastique, etc.
Mais alors, ces femmes/têtes ou bustes ne sont-elles que d’apparence ? Sans doute pas ! Au visiteur de découvrir alors, pas à pas, les infimes symboles qui se cachent derrière l'absence de corps : Puisque, par exemple, elles sont dépourvues de troncs, l’absence subséquente de jambes les empêche d’"aller vers…", contrairement aux "entières" si mobiles. Puisque la plupart d’entre elles sont dépourvues de bras, il leur est impossible d’appréhender le monde extérieur. Puisqu’elles sont tellement femmes, elles peuvent sembler en attente de partenaires (même si leur coexistence exclusivement féminine peut aussi suggérer le contraire)… En tout cas, elles restent là, statiques, leurs grands yeux plongeant droit dans celui du visiteur en off !
Un travail réfléchi, donc, mais pour lequel l'artiste semble beaucoup s'amuser au milieu de toutes ses filles un peu follettes, très remuantes comme il a déjà été dit ! Finalement, quelle que soit leur "formulation", sculptures en pied, en tête, ou à mi-chemin entre les deux, ludiques ou sérieuses, simples ou sophistiquées, les œuvres de Jocelyne Denoual sont, par le mélange d'apparences qu’elles véhiculent, par leur totale adéquation entre réalité et fantasmagorie, porteuses d’un message intemporel d’une puissante poésie.
Jeanine RIVAIS
TEXTE ECRIT SUITE AU BIZ'ART FESTIVAL 2017 DE HAN-SUR-LESSE EN BELGIQUE.