MELISSA STREICHER dite MELI, peintre

Entretien avec Jeanine Rivais.

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Jeanine Rivais : Mélissa, vous êtes très jeune, quelle définition donnez-vous de votre travail ?

Mélissa Streicher : Il me paraît difficile de le définir en quelques mots. Mais je dirai qu'il est autobiographique.

 

JR. : J'allais dire : "C'est l'humain, l'humain uniquement".

MS. : Oui, en effet.

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            JR. : Dans quelle mouvance vous sentez-vous ? Avez-vous l'impression de vous rattacher à une quelconque tendance picturale qui correspondrait à votre génération ?

            MS. : Le peintre que je vénère est Egon Schiele.

 

            JR. : Mais alors, vous remontez plus loin dans le temps !

            MS. : Oui, mais j'aime beaucoup les Expressionnistes allemands, ce sont un peu mes origines, puisque je vis en Alsace.

 

            JR. : Qu'est-ce qui vous attire dans la notion d'Expressionnisme ?

            MS. : Ce sont des créations à la fois singulières ; et, en même temps, il y a un travail sur le trait. De plus, c'est figuratif. Et chaque œuvre exprime des sentiments très puissants.

 

            JR. : Vous aviez commencé à parler des couleurs ; et il est vrai que votre travail est très coloré. Et vous travaillez sur de grands formats. Bien sûr, vous en avez aussi des petits, mais il me semble qu'il y a une respiration sur les grands formats, et les portraits sont entiers, alors que sur les petits, ce sont plutôt des cartes d'identité.

            MS. : Oui, j'aime bien "me lâcher" sur les grands formats, au niveau de la couleur, du trait, du geste…

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JR. : L'ensemble de vos tableaux est, peut-être pas réaliste, mais au moins très humanisé. Je suis donc surprise de trouver au milieu ce grand tableau complètement déstructuré, où l'on trouve aussi un visage, mais que vous auriez traité comme un vitrail.

            MS. : Oui, comme une mosaïque, plutôt. En général, je ne réfléchis pas trop à ma façon de faire. Les idées me viennent de manière très impulsive. Du coup, je ne peux pas les expliquer de façon très rationnelle. Il m'arrive d'avoir envie de travailler différemment, car je pense que je suis en quête, en recherche. Je travaille beaucoup, mais je pense qu'il me reste encore à définir mon style plus précisément. Mais par ailleurs, j'aime avoir cette liberté, procéder comme j'en ai envie, ne pas m'enfermer dans un style.

 

            JR. : Vous aviez commencé à dire, et je vous ai interrompue, que ce travail était très autobiographique, ce qui signifie qu'autour de vous, nous avons de multiples "vous-même" ? Qu'est-ce qui fait que vous éprouvez le besoin de "vous avoir" à l'infini autour de vous ?

            MS. : Je crois que l'art est aussi une quête identitaire. C'est donc moi, mais pas forcément uniquement moi, c'est aussi tout ce qui m'entoure. D'ailleurs, souvent, on me dit que tel personnage me ressemble, alors que je n'avais pas pensé faire un autoportrait ! C'est donc chaque fois vrai et pas vrai !

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JR. : Question à deux sous : vous préférez-vous en blonde, en brune ou en rousse ?

            MS. : Les trois, en fait, indifféremment !

           

JR. : Quelqu'un qui regarde tous vos tableaux, se dira que c'est donc autant de fois vous, mais toujours hors de tout contexte. C'est-à-dire que vos fonds ne sont pas signifiants. Les vêtements, quand il y en a, sont toujours atemporels. Il n'y a pas de détails qui permettraient de vous situer géographiquement, socialement ou historiquement. Pourquoi cette volonté de n'être ni dans le temps, ni dans l'espace ?

            MS. : Je crois que c'est parce que, seule, la figure humaine m'intéresse ? Et peu importe le contexte dans lequel il peut se trouver. Le visage, l'expression. Placer une expression sur un visage n'est pas toujours évident. Déterminer un regard.

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JR. : Sur certains de vos portraits, vous avez collé ce qui ressemble à des pustules. Pourquoi avez-vous fait ces effets de matière ? Est-ce pour vous enlaidir ?

            MS. : Non. Il est vrai qu'un des personnages a l'air d'un grand brûlé. C'est parce qu'alors, seul m'intéresse le travail de la matière.

 

            JR. : Pour terminer, y a-t-il d'autres sujets que vous auriez aimé évoquer et dont vous n'avez pas parlé ? Des questions que vous auriez aimé que je vous pose et que je n'ai pas posées ?

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            MS. : Non, parce que je trouve qu'il n'est pas du tout évident de parler de son travail. Si on est peintre, c'est parce que l'on a besoin d'exprimer des choses en dehors de la parole. Il est difficile de mettre des mots sur ce que l'on peint. Par mes tableaux, par ma peinture, je parle de choses que je ne sais pas dire. J'y rends compte de mes émotions, sans pouvoir forcément y mettre des mots.

Cet entretien a été réalisé à Banne, dans les Ecuries, le 16 mai 2010.