Jeanine Smolec-Rivais : "Blatman", cette dénomination que je suppose être un pseudonyme vous place immédiatement dans une connotation de super-héros ! Par contre, vos œuvres sont généralement petites et elles n'ont rien à voir avec ce personnage qui bondit d'un mur à l'autre ou qui sauve le monde ?
Blatman : J'intègre beaucoup de personnages de super-héros : c'est de la récupération de jouets ; l'univers correspond à un minimum quand même !
J.S-R. : Vous êtes effectivement dans un monde un peu ludique. Je vois par exemple des petits soldats. Mais je remarque que vos compositions sont toutes monochromes. Pourquoi ce parti-pris ?
B. : Pour marquer un peu la proximité avec la sculpture, vu la présence de matières, du plastique, etc.
J.S-R. : Diriez-vous que les deux qui sont devant nous sont des reliquaires ?
B. : Oui, si on veut !
J.S-R. : Je dirai que le personnage dans le "reliquaire" gris a quand même "de beaux restes" : habituellement, les reliquaires ne contiennent que des os, ce qui n'est pas le cas pour le personnage qui y est enfermé. Pour l'autre, certes, ne subsiste que l'apparence, puisqu'il n'y a plus que le vêtement. Et pourquoi enfermez-vous certains de vos personnages au fond d'une cage ?
B. : Remarquez que, sur l'une des œuvres, j'ai enfermé un homme dans une cage, avec une femme !
J.S-R. : Oui, je voyais déjà la femme !
B. : Ce sont des cadres photos, dans lesquels j'enferme de petits paintings que je faisais avant. Des dessins que j'ai pris en photos. De façon à illustrer la photo.
J.S-R. : Et maintenant, vous ne faites plus de photos ? Vous ne faites que de la sculpture ?
B. : Je suis joueur. Je joue avec tout. Avec mon appareil photos, je peins de temps en temps, j'expose parfois mes peintures.
J.S-R. : Parlons de ces drôles de personnages. Je trouve cette partie de votre travail, assez dramatique. Vous êtes parti d'une véritable carcasse d'oiseau, d'aigle même, je crois… Puis un renard écorché…
B. : Un épervier.
J.S-R. : Est-ce que ce genre de composition n'est pas éphémère ? Ou bien l'avez-vous traitée pour qu'elle reste pérenne ?
B. : Je récupère , dans des brocantes, des animaux qui sont déjà traités. Mais qui sont déjà abîmés.
J.S-R. : Tout de même, la sensation du toucher n'est pas du tout la même, entre ces plumes d'oiseau et les objets que vous avez mis dessus et qui semblent métalliques !
B. : C'est du plastique. Presque toujours, c'est du plastique.
J.S-R. : Où récupérez-vous cette multitude de petits jouets, de petits objets que vous agglutinez dans vos compositions ? Sur des brocantes ?
B. : Sur des brocantes ; près des enfants d'amis qui grandissent ; sur les poubelles parfois. Un peu partout, dès que je peux.
J.S-R. : A faire le tour de vos œuvres, je dirai que vous pratiquez plutôt l'humour noir : mais que vous atteignez le macabre, dès que vous avez des animaux ? Est-ce que cette définition vous convient ?
B. : Un faux côté macabre. Non, pas macabre.
J.S-R. : Que diriez-vous, alors ?
B. : C'est une fausse chair, en fait! Cela donne l'impression d'être écorché, mais ça ne l'est pas !
J.S-R. : Mais tout de même, le premier regard reçoit un choc !
Parlons de votre machine à coudre. Je trouve amusant quand vous pratiquez un détournement. Chacun a en tête une machine à coudre horizontale, or vous l'avez mise verticale.
B. : Là, elle est érotique.
J.S-R. : En effet, vous semblez avoir repris une scène sculptée sur une stalle de l'église de Brou, où un moine est en train d'en fesser un autre !
En somme, vous semblez vous amuser beaucoup !
B. : Je ne fais que cela !
J.S-R. : Y a-t-il des questions que vous auriez aimé que je vous pose et que je n'ai pas posées ; parce que je ne suis pas très familière de votre genre de travail ?
B. : Je ne suis pas très bavard !
J.S-R. : Oui, je le constate !
B. : J'essaie d'être très clair avec ce que je fais !
J.S-R. : Vous l'avez été tout à fait !
B. : Les thèmes, c'est en somme l'homme !
ENTRETIEN REALISE A SAINT-PAUL LE JEUNE, AU FESTIVAL BANN'ART ART SINGULIER ART D'AUJOURD'HUI 2012.