GABRIEL LALONDE , auteur, peintre et sculpteur, est canadien, d’origine québécoise. Ce recueil, "Toi que jamais je ne termine", d’une remarquable richesse linguistique, est une grande quête d’amour : poèmes du temps de l’amour ("Sur nos bouches accouplées, l’instant s’est arrêté") ; d’après le temps de l’amour ("Je sais la couleur de l’attente…") ; d’un temps où il pourrait être tristement absent ("En allant vers toi, / Je me referme sur le vide") ; et d’un temps incertain où les mots de l’auteur atteignent leur apogée, sans que le lecteur puisse déterminer s’il s’agit de réalité ou de fantasme ("Dormir follement en embrassant la mousse / De ton sexe de femme / De ton sexe de fête /… Une seule fois / Mourir d’adieu / Mon Elle de cœur / Mon aile de nuit")

 

En même temps, tout au long de l’ouvrage, le poète donne à la nature une part égale à celle attribuée à la femme aimée : les rivières, bois, oiseaux les oies en particulier, mais surtout "L’odeur du varech et des algues séchées / Le sable bleu de la mer"…

Ce deux sentiments très forts reviennent sous la plume de Gabriel Lalonde, avec à l’origine une expression différente pour chacun : allitérations douces lorsqu’"Une main de rivière plus douce que l’eau douce / coule…". Expressions de grand calme serein : "Il y a aussi le silence des fleurs / quand elles mangent la terre". Vocabulaire et syntaxe plus heurtés, rythmes irréguliers au gré des élans du cœur, emploi récurrent de l’anaphore : " Femme… Femme… Belle belle…", comme en une ritournelle lorsque l’amour est là ; puis allitérations dures lorsque viennent les moments moins épanouis, que règnent l’ennui et le chagrin : "Mes mots meurent / meurent…"

 

Jusqu’au moment où, semble-t-il, affolé d’amour, Gabriel Lalonde confond en une même étreinte, cette nature et cette femme :

"Quand tu voles leurs couleurs

   A mes heures de nuit

   Je te nomme femme…

   Ta peau de terre promise

   De grande orange dépouillée

   Ta peau de terre blanche

   Ta peau myrtille de forêts enneigées…"

Et le dernier vers enfin, "Mon Elle de nuit", où cette majuscule et cette homonymie (Elle / Aile qui devrait être l’orthographe logique) laissent l’auteur et le lecteur haletants ; puisque tout au long du recueil, aucune ponctuation ne leur a permis le moindre répit ; et que son absence rédhibitoire corrobore le titre : "Toi que jamais je ne termine…", même si celui-ci implique l’insatiable désir d’amour de Gabriel Lalonde…

Jeanine RIVAIS

 

En 2005, l'auteur remporte le Prix de la Ville de Montreux, décerné lors de la 5e édition de la foire en arts contemporain Art Forum, en Suisse, pour l'ensemble de son œuvre.

 

GABRIEL LALONDE : "Toi que jamais je ne termine" Edition Le loup de gouttière, 347 rue Saint-Paul QUEBECGIK 3X1. (1998).

 

CE TEXTE A ETE ECRIT EN 1998.