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De sa naissance en Languedoc, dans un hameau du joli nom de Fouscaïs (Fontaine de Cassius), Katty Vemy-Dugelay a rapporté dans sa poésie la chaleur du midi ; de son enfance passée dans un jardin clos autour d’une maison retentissant des lieder de Schubert, elle a gardé la musicalité ; de son mariage avec un peintre dont l’œuvre est un hymne aux rythmes naturels, elle a évolué vers une harmonie avec la nature et le cosmos ; d’une profonde souffrance qu'elle a voulu libératoire, vécue dans l’entourage d’une enfant handicapée, elle a gagné une maturité, une ouverture vers le monde, vers les autres : ce mélange d’influences combinées à son talent, a généré une œuvre profonde, lyrique, dans laquelle le poète s’est si totalement impliqué que vie et poésie sont désormais inséparables.
Très personnelle, l'œuvre de Katty Vemy-Dugelay, se situe hors-les-modes, hors-ses contemporains; et s’il fallait absolument lui trouver des référents, ses courts poèmes entourés de larges blancs l’emmèneraient sans aucun doute vers la poésie japonaise, “à cause du regard ébloui posé dans l’instant sur les petits éclats de vie".
Comme dans les écritures orientales, elle va "des autres vers soi”; de son appartenance à une globalité cosmique aux états d’âme du poète. Chaque texte, écrit en vers libres, est disposé comme les poèmes traditionnels, "avec quelques petites découpes qui font la différence". Et, que le texte ait jailli en quelques secondes ou nécessité une longue maturation, le lecteur a l’impression d’une écriture spontanée, très imagée, “Les palanquins de stalactites”... d'un style volontiers précieux “les digitales/ gantées d'ombre mauve", “les cantates du ruisseau/ les harmoniques de l'herbe..."; parfois suranné “aulne, conque, éden...” ou mythique “Deux sphinges gardent le secret du lieu..." toujours très musical “Soie sauvage d'enfance/ son bruissement...”
Les mots, l’écriture expriment l’intense jubilation éprouvée par Katty Verny-Dugelay à les choisir avec une précision d'orfèvre, à créer des harmonies et des rythmes inattendus, à enchaîner métaphores et allitérations : à traduire ses attentes, ses peurs, ses impatiences, toute sa grande force de vie.
Modeste, le poète a intitulé son premier recueil "Empreintes", persuadé de ne devoir laisser dans la littérature qu’une toute petite trace. L’inspiration venant, "Corolles de l'ombre" a exprimé l’espoir que, même gardées à l’ombre, les fleurs, partant sa poésie, pouvaient croître et s'épanouir. "Saisons du silence" impliquait qu'était arrivé le temps de la réflexion, de la méditation. Et le plus récent ouvrage, "Herbe ouverte" qui traite de la mémoire, exprime une grande libération, le besoin de resurgir enfin à la lumière : ce cycle confirme donc de façon éclatante, l’osmose de Katty Verny-Dugelay et de la nature : pour le poète comme pour la terre, les périodes apparemment stériles ne sont en fait que de longs moments de gestation, d'attente sourde, suivis de périodes de grande créativité. Se succèdent dans ses œuvres, comme pour les saisons, le temps des fleurs, des fruits, celui de l'arbre nu, puisque “après tout, l’hiver est parfois si beau".
Jeanine RIVAIS
Les recueils cités ont été édités aux Editions Caractères.
VOIR AUSSI : ENTRETIEN DE JEANINE RIVAIS AVEC "KATTY VERNAY-DUGELAY" : http://jeaninerivais.jimdo.com/ RUBRIQUE POETES.
Et TEXTE DE JEANINE RIVAIS "POESIE ET ORALITE : MAURICE LESTIEUX ET KATT VERNY-DUGELAY POTES" : http://jeaninerivais.jimdo.com/ RUBRIQUE POETES.