VITAE SPLENDOR, LA SPLENDEUR DE LA VIE

De CHRIS BESSER peintre

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          Ni temps. Ni profondeur de champ déterminant un lieu. Ni action. Des protagonistes d'un paradis terrestre, venus à la porte d’Eden contempler le visiteur, l’air de s’interroger sur la provenance de l’intrus ?

          Un étrange bestiaire, en fait, où "humains" et "animaux" cohabitent en totale harmonie ; marqué par tous les mythes qui ont enchanté l’enfance de Chris Besser ; tous les folklores qui ont éclairé ses voyages ; tous les extra-terrestres qui ont alimenté ses rêves. Venu par ailleurs de très loin dans l’inconscient de l'artiste : pour parvenir à cette création sereine, elle a dû vaincre bien des terreurs !

 

          D’abord, il y eut "Meurtres de femmes", polyptyques présentant des "portraits" féminins, visages échevelés, défigurés par la peur, tendus vers l’avant pour échapper à leur cadre ; vus à travers des flots de peinture, projections, dégoulinements qui rendaient encore plus morbides ces "cris" de terreur abjecte.

        Comment sortir d’une telle souffrance ? 

          Une série de "tableaux-duels" (une plage tourmentée, sa contrepartie calme, rassurante) a  progressivement attiré l’artiste vers un monde bien à elle, un monde idéal : elle a créé "la Splendeur de la vie".

 

          Désormais, elle prend son temps, prépare longuement le support sur lequel naîtront ses créatures : elle enduit la toile de peinture ; elle mélange colle, sable, feuilles, bois, fougères... afin de créer une épaisseur sous-jacente, suggérer des accidents, provoquer des empreintes. Pas d’idées préconçues, aucune volonté de reproduire tel personnage ou telle scène : simplement, quand la toile est prête, la main de l’artiste est prête, et la mise en scène s’élabore d’elle-même. C’est ainsi qu’à la porte d’Eden se retrouvent côte à côte E.T. et quelque princesse portant coiffe et collerette de linon ; Aladin racontant à la reine de Sabbat l’histoire des trois petits cochons ; Pharaon suçant son pouce devant un improbable jaguarondi, etc.

          Cette série est pleine de tendresse, très féminine par la sensibilité qu’elle manifeste. Chris Besser y semble parfaitement à l’aise, détendue comme quelqu’un qui serait définitivement sorti d'un cauchemar.

Jeanine RIVAIS

 

Ce texte a été écrit en 1994 et publié dans le N°38 de Juillet/Août de La Revue IDEART.