PAYSAGES OU PERSONNAGES, NATURES MORTES 

DE FRANCOISE BOUSQUET, peintre

*****

        Françoise Bousquet est musicienne et mathématicienne. Les deux influences se disputent la primauté dans les oeuvres de cette autodidacte qui, depuis plusieurs années, consacre ses loisirs à peindre sur le motif certains jardins du Vexin qu’elle affectionne, certaines rues du XXe arrondissement de Paris où elle flâne, certaines personnes de son entourage dont les attitudes familières l’intéressent...

        La mathématicienne en elle l’entraîne vers des paysages hivernaux, raides de froid ; des scènes de montagne où les reflets bleutés de la neige scintillent sous un soleil glacé : poignante est l’immobilité des arbres dénudés tordant leurs branches noires sur la masse lourde des sapins qui barrent l’horizon. L’artiste, à l’évidence, aime les scènes statiques. Elle passe et revient à larges coups de pinceau sur ces paysages sans âme, s’y “promène” avec plaisir comme si, vides et impersonnels, ils laissaient toute la place à son imaginaire!

         Beaucoup plus fantaisiste et chaleureuse est l’influence de la musicienne qui fait vibrer les verts tendres ou les bruns automnaux, crée de mystérieux recoins entrevus d’une fenêtre largement éclairée ; fait bifurquer quelque allée à travers champs ; luire sur un fourneau dans un intérieur douillet, une bassine de cuivre ; se découper à contre-jour un groupe de promeneurs attardés devant des fougères rouillées. Même pour les voyageurs du métro, isolés dans leur fatigue du soir, elle retrouve des chatoiements sur des vêtements pourtant sans nuances et sans élaboration ! Car, lorsqu’elle peint “de mémoire”, Françoise Bousquet donne à ses natures mortes ou à ses personnages, des airs inachevés, des visages non élaborés, simplement suggérés, rappelant qu’elle ne traduit alors que des impressions rémanentes, entrecoupées de sensations oubliées !

Ainsi, tour à tour, passe-t-elle de la vie à l’immobilisme, de la légèreté et du foisonnement à une concentration austère, les deux personnages antithétiques se retrouvant à l’unisson sur un seul point : le droit hautement revendiqué d’exprimer l’un ou l’autre au gré de sa fantaisie. 

Les différentes récompenses qui ont couronné ses participations aux salons de Pontoise, Fontainebleau, Orsay... ou à des expositions plus restreintes à Paris, prouvent qu’elle a su imposer ces deux pôles de sa personnalité, convaincre les spectateurs de son double talent.

Jeanine RIVAIS

 

CE TEXTE A ETE ECRIT EN 1994.