Figuratives, hyperréalistes même, les œuvres de Jaime Zapata offrent au spectateur toute l'angoisse, les terreurs et les inhibitions véhiculées depuis ses lointains ancêtres conquérants et inquisiteurs : Derrière une table nappée, chargée de précieux coquillages d'argent ? de corail ? Disposés comme pour une Cène, émerge indistinctement d'un fond noir mêlé de sépias, une inquiétante tête de moine encapuchonné ; tandis qu'au premier plan, un magnifique dos féminin et deux bras vêtus de dentelles, supportent une tête invisible, parce qu'enfouie sous la nappe : La tentation de la chair ? Ailleurs, trois femmes inexpressives aux traits grossiers, nu-pieds, se tiennent côte à côte devant un horizon montagneux, mains croisées ou dissimulées derrière de lourds manteaux : La patience du peuple ? L'histoire ? ou la légende ?
Dans une autre palette, des encres sur papiers présentent des personnages bifides, muselés ; une femme au corps blanc, aux chairs lumineuses, est violée par une sorte de monstre purulent, etc.
Variations sur le dédoublement de la personnalité, fantasmes du peintre ou retour vers ses racines, toutes les œuvres exposées sont des merveilles de technicité. Comme chez les artistes baroques, les formes tendues, les contours et les détails minutieux portent au paroxysme de l'expression, le travail du peintre. Sa spiritualité, ses passions, ses volontés ou ses refoulements, l'intensité et le pathétique s'introduisent dans la peinture de Jaime Zapata, et subséquemment imposent au visiteur la violence rentrée de l'œuvre.
Une très belle exposition. A la fin de sa trop courte visite, le visiteur ne peut que s'exclamer : "Que Viva Zapata !"
Jeanine RIVAIS
CE TEXTE A ETE ECRIT EN 1999, LORS DE L'EXPOSITION DE JAIME ZAPATA ET VICTOR ARTIDA A LA GALERIE MAILLETZ PARIS